Syrie: ouverture des frontières à des envoyés spéciaux

Christophe Lamfalussy, journaliste à La Libre Belgique et Françoise Walmacq, journaliste à la RTBF, ont été autorisés à pénétrer en Syrie. Premiers envoyés spéciaux à agir officiellement sur le sol syrien, ils livrent leur témoignage.

Comment êtes-vous parvenus à rentrer comme journalistes en Syrie?

Christophe Lamfalussy: On a été contacté par une religieuse catholique qui habite en Syrie, à Qara. Elle voit la nécessité qu’il y ait une autre voix qui se fasse sur la Syrie. La plupart des informations dont on dispose actuellement viennent de l’Observatoire syrien des droits de l’homme qui est à Londres. Il est géré par une personne qui est en contact avec l’opposition. Donc ce qu’on entend depuis des mois n’est que la voix de l’opposition. Le gouvernement syrien, qui a fermé la porte aux journalistes pendant des mois, n’a pas sa voix. Nous avons estimé qu’il était important d’entendre le point de vue des autorités, de voir ce qu’il se passe du côté des sympathisants au régime de Bachar al-Assad.

Françoise Wallemacq: Nous avons été invités par des religieuses catholiques qui craignent que le pays soit déstabilisé par une guerre civile et que les chrétiens soient menacés comme c’était le cas en Iraq. Elles nous ont invité avec l’approbation du régime qui a tout intérêt à protéger les minorités religieuses. Quarante religions différentes vivent en coexistence harmonieuse en Syrie. Une guerre civile déstabiliserait tout cet équilibre. Nous n’étions donc pas invités, mais tolérés par le pouvoir.

N’est-ce pas risqué pour le régime de tolérer des journalistes étrangers?

Christophe Lamfalussy: C’est un pari qu’ils font. Ils nous ont laissé une certaine liberté. Ils nous ont conduit dans un certain nombre d’endroits dans lesquels nous avions une liberté de parler à qui nous voulions. Une exception a été faite pour les quartiers plus difficiles de Homs où l’on ne peut pas aller. Si vous êtes avec  les forces de l’ordre, vous ne pouvez pas vous approcher de la rébellion et vice versa. On est obligé de faire une sorte de journalisme par camp. Et c’est la synthèse des deux visions, à mon avis, qui amène le plus près de la vérité. On a quand même vu des policiers dont les corps avaient été découpés après la mort. On a vu des atrocités aussi commises par la guerilla. Comme dans toute guerre, il y a des atrocités commises par les deux camps. Même si le gouvernement syrien porte une énorme responsabilité dans ce qui est fait, nous pensons, nous journalistes, qu’il faut aussi aller voir l’autre camp.

Dans vos reportages, vous parlez des prémices d’une guerre civile.

Christophe Lamfalussy: C’est une guerre civile dans la mesure où l’opposition se retrouve désormais bien armée, bien organisée. Elle a constitué plusieurs armées dont une opère à partir du Liban et une autre depuis la Turquie. Elles mènent des opérations de soutien aux habitants qui sont en révolte à Homs et dans d’autres villes. Dans ces armées de libérations, se trouvent des soldats déserteurs de l’armée syrienne.

Françoise Wallemacq: D’après les blessures qu’on a vu dans les hôpitaux sur les corps de militaires, les opposants sont désormais armés lourdement et de manière sophistiquée. Ils font subir des pertes importantes à l’armée et à la police. J’en déduis que les opposants sont maintenant soutenus de l’extérieur, que ce soit au Liban et en Turquie. Je ne sais pas par qui, mais je peux dire que les dégâts affligés à l’armée syrienne – l’une des plus puissantes armées avec un personnel de plus de 600.000 hommes – montrent que l’opposition s’est radicalisée en huit mois.

Comment avez-vous ressenti l’attitude de la population syrienne ?

Christophe Lamfalussy: La population en a surtout assez. Elle voit ce qui se passe. Les gens ont peur d’aller d’un quartier à un autre. Dans la ville de Homs, les habitants ne circulent quasiment plus. Les devantures des magasins sont descendues. Il y a très peu de trafic. Une partie des gens est aussi tout simplement partie ailleurs. Il y a une peur que quelque chose se passe. Des gens ont déjà été tués soit par l’armée soit par la rébellion. Dans d’autres villes comme Damas, le climat y est très calme. La vie a gardé son cours normal. Les zones de conflits restent localisées, mais risquent de s’étendre à l’ensemble du pays.

Françoise Wallemacq: Quand on arrive sur place, la situation est très différente de ce qu’on imagine ici. On a pu circuler librement à notre arrivée à Damas. Des habitants nous accostaient spontanément parce que nous avions une caméra. Ils nous racontaient que ce qu’on voit de la Syrie à l’extérieur n’est pas ce qui se passe à l’intérieur. Une grande majorité de la population soutient encore Bachar Al-Assad. Les gens venaient vers nous en nous donnant des bracelets aux couleurs de la Syrie, en disant que les médias mentent sur ce qu’il se passe. Des habitants ne sont pas contraires à des réformes, mais elles doivent selon eux venir de l’intérieur et non de pressions externes au pays, d’Etats de la région qui ont peut être des intentions cachées tels la Turquie, l’Arabie Saoudite, le Quatar. Par contre, nous avons senti une très grande peur des gens à Homs. Une peur par rapport à des gangs armés qui les menacent. On ne sait pas qui manipule. Il faut être très prudent. On a croisé des manifestations de l’opposition dans des villages reculés. Nous y avons été très bien reçus. Les gens tenaient à nous dire qu’ils ont un bon nombre de chrétiens dans leurs rangs.  Il y a une guerre d’image qui se déroule en ce moment. Il faut être extrêmement prudent quand on parle de ce pays.

Des habitants soutiennent Bachar Al-Assad malgré les atrocités commises ?

Christophe Lamfalussy: Tout d’abord, ils ne savent pas tout ce qui a été commis. L’information est bien contrôlée au sein des médias syriens. Ils ont également d’autres sources d’information que les nôtres. Un réflexe traditionnel des pays nationalistes qui m’a frappé, c’est qu’on insiste très fort sur son unité nationale face à un ennemi extérieur. Pour eux, la rébellion est alimentée depuis l’extérieur, par des groupes salafistes et autres. C’est comme ça que se construit la façon de penser des habitants de Damas et d’ailleurs.

Que peut-on dire des différentes minorités ?

Christophe Lamfalussy: Les alaouite représentent une minorité de 10% de la population syrienne. Le président est issu de cette communauté. D’où certainement sa crainte que si le régime chute, ils seront les premiers à subir un retour de flamme. Les chrétiens font à peu près 10%. Ils sont plus ou moins modérés. Et il y a surtout une majorité de sunnites. Il est important de rappeler que tous les sunnites ne sont pas contre le président. Malgré tout, la rébellion naît dans les quartiers sunnites. Derrière la rébellion, il y a des revendications pour une meilleure répartition des richesses. Beaucoup réclament également la démocratie, mais sans vraiment savoir ce qu’ils entendent par là. La Syrie est un pays à l’équilibre très fragile qui a quand même bien respecté jusqu’à présent les droits des minorités malgré son caractère autoritaire.

On parle pour l’instant d’une guerre civile, mais quid d’une guerre de religion ?

Christophe Lamfalussy: Basculer dans une guerre de religions est évidemment le grand risque. C’est ce que craignent les syriens que nous avons rencontrés.

Quelle est la situation des médias en Syrie ?

Françoise Wallemacq: Il faut savoir qu’il n’y a pratiquement aucun journaliste étranger sur place. Les seuls qui ont pu rentrer en Syrie depuis huit mois, sont rentrés clandestinement. Je pense aux journaliste du Monde Diplomatique et d’Arte qui sont rentrés avec des caméras cachées et en se faisant passer pour des touristes. Ce qui est extrêmement dangereux. Les médias locaux sont monopolisés par le pouvoir. Il n’y a pas de médias libres sur place. L’opposition s’exprime en filmant des manifestations qui se déroulent tous les jours dans le pays, en postant leurs vidéos sur Youtube par téléphone portable et en les envoyant aux chaînes étrangères comme Al Jazeera.

La Syrie s’est complètement fermée aux journalistes. Elle ferait mieux d’ouvrir ses frontières aux reporters, aux observateurs des droits de l’homme, aux émissaires de la Croix Rouge pour que les gens se fasse une opinion plus ou moins objective de ce qu’il se passe sur place. En se refermant aux médias, le régime permet toutes les rumeurs, affabulations et diabolisation de ce qu’il fait alors que la réalité est bien plus compliquée sur le terrain.

« World is on fire » – fiction radiophonique

Une planète qui part en vrille, une intelligence artificielle omniprésente et des mouvements de rébellions un peu partout composent les ingrédients du cocktail de science-fiction de cette nouvelle radiophonique. Réalisée par Benoît Theunissen, Caroline Franki, Elena Mauën et Fiona Gahimbare, cette fiction est le fruit de trois mois de travail dans le cadre d’un cours de radio à l’IHECS. Avec la voix d’Alban Barthélémy dans le rôle de l’ordinateur central. Bonne écoute!

San Marino / Source: Benoît Theunissen

San Marino, la cité des airs

Troisième plus petit Etat d’Europe, la République de San Marino se trouve enclavée dans l’Italie, à la pointe orientale du massif montagneux des Apennins entre l’Emilie-Romagne et les Marches. Il s’agit de la plus ancienne des républiques. Elle culmine à 739 mètres d’altitude. Sa superficie est de 60,57 km². Elle compte  31 978 habitants dont 5 002 étrangers. La naissance du pays remonte à l’an 366 PCN. 
Reportage photo. 

Galerie

L’ERM: La guerre totale pour le talent

Cette galerie contient 27 photos.

L’ouverture de l’année académique 2011-2012 de l’Ecole Royale Militaire a eu lieu le jeudi 6 octobre sur l’esplanade du Cinquantenaire à Bruxelles. Quelque 800 élèves et stagiaires ont pris part à la cérémonie militaire. (Reportage photo)

La petite Anatolie de Bruxelles

En plein cœur de la commune de Schaerbeek réside une partie de la communauté turque de Bruxelles. Ambiances et scènes de vie.

Un quartier de Bruxelles aux repères différents

« Trois bières pression, SVP. » La serveuse fait signe de ne pas comprendre. Après de vaines explications, trois Jupiler en bouteilles atterrissent sur la table, versées dans des verres de jus d’orange. Commander des bières n’a pas l’air très fréquent dans ce café de la rue des Palais. Un drapeau turc trône sur le comptoir. Le client inhabituel réalise vite qu’il n’est pas dans n’importe quel quartier de la ville.

Malgré plusieurs façades dans le style art déco, typiques de l’époque de nos grands-parents,  les environs de l’église Sainte-Catherine respirent la différence culturelle. La communauté turque y a élu domicile.

Ici, les habitudes de vie diffèrent d’un autre quartier de la capitale. Les épiceries halal à la plupart des coins de rues, les linges pendus aux fenêtres, certaines inscriptions en turc dans des vitrines de magasins font penser à Istanbul.

Une identité turque forte

A en croire la présence de drapeaux qu’on retrouve aussi bien sur les voitures que sur la devanture de certains commerces, l’identité turque occupe une grande importance aux yeux des habitants. Les agences de voyages offrent à la vue des passants des maquettes d’avion de la compagnie Turkish Airlines. Les paysages aériens de paraboles satellites postées sur tous les toits rappellent également la nécessité d’être en permanence rattaché au pays.

Une ambiance particulière

C’est à travers un dédale de rues et dans une odeur de durums que se déroule une grande partie de l’activité des lieux.  Avant 16 heures, tout est calme. Seuls les trams 94 filent dans les longues rues ternes, mais propres. Les quelques piétons, généralement plus âgés en journée, peuvent entendre résonner contre les façades anciennes et décrépies les bruits stridents du frottement des roues sur les rails.

Les sorties d’écoles marquent le regain de l’activité dans les rues. Principalement sur le parvis de l’église Sainte-Marie, plusieurs scènes de vie se dessinent. L’automne est enfin là, le vent est doux. Quatre bambins trouvent le moment idéal pour jouer au ballon. Ils se faufilent entre les pigeons de la place sans même en effrayer un seul. Tout sur la place semble être habitué à leur présence. Leur balle vole parfois vers l’arrêt de tram, atteint l’un ou l’autre passager. Nul ne bronche. L’un d’eux renvoie le ballon naturellement. Dans d’autres quartiers de la ville, les enfants se seraient sévèrement faits prier d’aller jouer plus loin.

Tout aspire au calme sur la place. Les allers et venues des voitures, les passages du tram, les conversations des habitants, le glissement des feuilles mortes sur les pavés se perdent dans le ronronnement de la ville. Seul le clocher de l’église qui sonne la demie heure me rappelle où je suis.